vendredi 30 septembre 2011

Protest Box / Kazuo Kitai : Sanrizuka

 
 
 
 

A la fin des années 60, Sanrizuka est un petit village d'une région agricole condamné à être rasé pour que l'aéroport de Narita, déservant Tokyo, puisse être construit. Jusqu'a son ouverture en 1978, les villageois, rejoints par des militants et des étudiants, vont protester violemment contre ce projet.

Kitai Kazuo rend compte de ce combat dans ce livre publié en 1971, en s'intéressant davantage au moment de pause qu'au conflit lui-même.  Cette lutte donnera naissance à plusieurs livres de photo tout au long des années 70. Si Kitai Kazuo use d'un style violent et sale caractéristique des photographes de Provoke - image hyper contrastée, grain énorme, goût pour l'abstraction -  il n'a pourtant jamais fait parti de ce groupe réunissant Daido Moriyama, Takuma Nakahira et Nobuyoshi Araki, pour ne citer que les plus célèbres. Il a néanmoins été une influence revendiquée par les 2 premiers, grands admirateurs de son Resistance (disponible pour 3500€ !), qui documentait les manifs étudiantes anti-guerre et anti-US du début des 60's, publié en 1965, soit 3 ans avant le premier volume de Provoke.

Kitai Kazuo : Sanrizuka (2011, Steidl)

mercredi 21 septembre 2011

LFO : Frequencies



En première année de fac, j'avais très vite sympathisé avec un mec qui m'avait reconnu comme l'un des siens parce que je portais un t-shirt Pixies. Quelques mois après la rentrée, il me proposait un plan super, enfin selon lui : une rave sous l'Arche de La Défense avec LFO. LFO ? jamais entendu parler ! L'autre problème, c'est que ce jour-là je devais porter un t-shirt des Smiths et, en ces temps reculés, les boundaries musicales n'avaient pas encore été breakées, chacun dans son coin, moi un peu plus que mon nouveau pote. Le boum boum de drogués, c'était définitivement pas ma tasse de thé, c'est tout du moins ce que je me disais à l'époque. Aujourd'hui, je m'en mords encore les doigts.

Frequencies est sorti il y a tout juste 20 ans (enfin presque, le 22 jullet 1991). Je ne vais pas vous la faire à l'envers : non je n'ai pas acheté ce disque à sa sortie. Ce n'est que quelques années après que je me suis mis à le convoiter. Mais le souci est qu'à ce moment là le distributeur dans notre pays, Fnac Music Dance Division, avait fermé les portes et, du coup, il était devenu tout bonnement impossible de mettre la main sur le disque. Je réussirais finalement à trouver cet album en rentrant d'un jour de l'an passé en Bretagne, dans une station service sur l'autoroute, perdu sur un tourniquet entre un best of de Nicolas Peyrac et une compilation Synthétiseur les Plus Grands Thèmes. Elle est pas belle mon histoire ?!

Etrangement, depuis, je n'ai plus jamais racheté de disque dans une station service.


(Dédicace à Vidal & Vérol)

LFO : Frequencies (Warp, 1991)

samedi 17 septembre 2011

William E. Jones : Killed - Rejected Images of The Farm SecurityAdministration

 


Je sais bien tout est dit dans le titre du livre mais laissez-moi quand même le recontextualiser en 2 mots pour les plus novices.

En 1935, sous l'impulsion de Roosevelt et de son New Deal plusieurs agences gouvernementales sont créées dont la Ressettlement Administration (RA), qui deviendra en 1937 la Farm Security Administration (FSA) qui nous intéresse ici. La division de l'information de la RA, dirigée par Roy Striker, va engager des photographes pour documenter la vie dans les fermes du pays et les actions menées pour sortir le secteur de l'agriculture de la crise. Les plus célèbres photographes recrutés sont Walker Evans et Dorothea Lange, cette dernière, dans ce cadre, publiera en 1939 le classique An America Exodus, co-signé par son mari, le sociologue/économiste Paul Taylor.

Killed, avec ses "rejected images", nous révèle en quelque sorte la face cachée de cette mission.

Le livre est sorti l'an passée à 1000 exemplaires par les excellentes PPP Editions, à qui l'on doit déjà les indispensables Sweet Home Yokosuka 1976 - 1980 de Ishiuchi Miyako, '71-NY de Daido Moriyama ou Gangs of Kabukicho de Watanabe Katsumi. PPP Editions vient par ailleurs d'éditer cette année une très belle compilation de l'artwork de Crass, s'il y a des amateurs !

William E. Jones : Killed (PPP Editions, 2010)

Sono Sion : Love Exposure (2008)



Ne vous méprenez pas, s'il y a un véritable héritier de la Nouvelle Vague il ne s'appelle pas Christophe Honoré mais Sono Sion. Sono Sion, aussi libre que le plus déluré des Rivette, celui de Céline et Julie Vont En Bateau, aussi inventif que le Godard des 60's, aussi émouvant que n'importe quel Truffaut, est bien plus que ça encore : c'est un raz-de-marée !
Avec Love Exposure, le japonais annihile les filmographies intégrales de ce que l'on nous dit être les cinéastes de notre temps, de l'imposteur Quentin Tarantino à l'enjôleur Wong Kar Wai en passant par le poseur Gus Van Sant. Ainsi, je pourrais écrire un roman pour vous parler de Love Exposure, il y aurait un long chapitre sur le romantisme, un autre sur le Boléro de Ravel, que je n'entendrais (qui l'écoute de nos jours ?) plus jamais de la même oreille, mais à quoi bon puisque plus personne ne lit de romans ?! Je pourrais aussi me réinscrire à la fac pour terminer mon mémoire sur l'adolescence et la famille en m'appuyant sur ce film...
Au bout des 4 petites heures de Love Exposure, pour une fois on a juste envie que le film ne s'arrête jamais, oui ! on commence tout simplement à se dire qu'on en a bel et bien fini avec le cinéma.
An absolut classic masterpiece !


PS : ne vous arrêtez pas aux images ci-dessus (violence, sexe, vomi...), faites-moi plaisir, soyez plus que jamais open minded pour découvrir Love Exposure !

vendredi 2 septembre 2011

Moï Ver : Paris


 Aujourd'hui, je vous propose une page d'histoire avec le mythique Paris de Moï Ver, une version raccourcie de son nom complet, Moshé Raviv-Vorobeichic !!!
En 1924, à 23 ans, il intègre le Bauhaus où il commence à étudier la photographie, qui n'est pas encore au programme officiel. Il part ensuite pour Paris où il intègre l'Ecole technique de photographie et cinématographie, tout en suivant les cours du soir à l'Académie Moderne, où enseigne Fernand Léger.
Publié en 1931, Paris, second livre de  Moï Ver après Ein Getto im Osten - Wilna ,consacré à sa ville natale Vilnius et publié la même année, dynamite littéralement le Paris carte postale d'Eugène Atget, compilé un an avant par Berenice Abott dans Atget, Photographie de Paris.
Cut up photographique hallucinant, sous influence Bauhaus, mise en page avant-gardiste, le Paris de Moï Ver  annonce déjà, par exemple, le Moriyama le plus "abstrait", celui de Sashin yo Sayonara (Bye Bye Photography, 1972) , pour preuve la photo qui ouvre le livre, la première reproduite ici. La seule différence entre les travaux de ces 2 photographes étant les 40 ans qui les séparent. Les superpositions d'images tout comme le montage cinématographique des photos rendent parfaitement le tumulte, l'énergie et l'agressivité de la ville. Moï Ver en restera là pour la photo et partira en Palestine se consacrer à la peinture.
Vous vous doutez bien que ce livre a longtemps été inabordable, à moins de demander à ses parents d'hypothéquer leur pavillon, mais en 2004 Karl Lagerfield, par le biais de sa maison d'édition 7L (affiliée à Steidl), a édité un magnifique fac-similé à 1000 exemplaires (toujours disponible à la librairie 7L).

Moï Ver : Paris (Edition 7L, 2004)

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